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Elisabeth / Erzsébet Báthory, la comtesse sanglante

Elisabeth / Erzsébet Báthory en 1585, à l'âge de 25 ans
Elisabeth / Erzsébet Báthory en 1585, à l'âge de 25 ans

Les prémices de ce qui constitue aujourd'hui l'Antre de Bloodwitch, ce site que vous êtes en train de visiter, ont ouvert leurs portes en mai 2005, cela va donc tout bientôt faire 18 ans. Et depuis cette année-là, je propose entre autres des articles sur le vampirisme mais aussi sur des légendes, dont certaines qui s'en rapprochent, à l'image de celui que j'ai fait au sujet de Vlad III Basarab, le vrai Dracula. Pourtant, je n'ai encore jamais évoqué une autre légende, tout aussi connue que celle de ce bon vieux Dracul. Je veux parler de la comtesse sanglante, Elisabeth Bathory.


De son véritable nom de naissance Erzsébet Báthory, cette femme n'est plus ni plus moins que l'une des criminelles les plus célèbres du monde hongrois et slovaque. Elle a passé une grande partie de sa vie au sein du château de Csejte près du village de Čachtice (actuelle Slovaquie), aussi est-elle surnommée tout naturellement "La dame sanglante de Csejte. On ne connaît pas en détail le nombre exact de victimes que cette comtesse a fait, mais on sait néanmoins que ses crimes ont débuté après la mort de son mari, en compagnie de quatre complices. L'ennui avec cette légende qui la poursuit, c'est que nous ne disposons de rien d'autre que de témoignages obtenus uniquement sous la contrainte, voire même la torture. Rien ne nous dit donc, au fond, si cette histoire est vraie ou non. Mais tous s'accordent à dire qu'Elisabeth Bathory recherchait la jeunesse éternelle à travers le sang de ses victimes, toutes jeunes et vierges. Voilà en résumé de quoi retourne son histoire.

Le château de Csejte, près de Čachtice
Le château de Csejte, près de Čachtice

Née le 7 août 1560 et morte le 21 août 1614, Elisabeth est née d'un père nommé György Báthory, frère du gouverneur de Transylvanie de 1552 à 1553. Elle est également la nièce d'Etienne Báthory, prince de Transylvanie qui deviendra par la suite roi de Pologne. Elle est donc née au sein de la famille la plus puissante d'Europe de l'Est, si puissante qu'ils ont adopté le nom "bathor" qui signifie "vaillant". Et comme il est de coutume avec les descendants de la haute société, la jeune Elisabeth est vouée à être mariée à un homme. Cet homme sera Ferenc 1er Nádasdy, tout d'abord baron puis comte, aussi appelé "Chevalier noir". Elle sera mariée à cet homme à l'âge de 15 ans, lui en ayant 20 à ce moment-là. De cette union, une fille est née en 1585, Anna. Puis Orsolua, une autre fille, ainsi qu'un fils nommé Andras, mais les deux sont décédés en bas âge. Il y aura ensuite une autre fille, Katarina, et enfin un fils, répondant au nom de Pál, en 1598. Par ailleurs, tous portent le nom de famille Nádasdy.

Elisabeth est une femme très cultivée, aussi est-elle capable de lire et d'écrire en 5 langues en plus du hongrois qui est sa langue paternelle. Pour l'anecdote, 32 lettres écrites de sa main sont conservées parmi les documents des Archives de la famille Nádasdy. Si la lecture vous intéresse, sachez qu'on retrouve le contenu de 40 lettres, écrites soit par elle soit en son nom, dans le livre "The Private Letters of Countess Erzsébet Báthory" de Kimberly L. Craft. Craft en a profité pour préciser le contexte historique, politique, social et religieux qui entoure ces 40 missives, ce qui permet une compréhension complète de l'ensemble de ce qui y est dit. Elle a également eu la délicatesse de proposer plusieurs traductions pour les mots qui posent problème dans la langue d'origine de ces courriers.

Le palatin György Thurzó
Le palatin György Thurzó

L'histoire aurait pu être chouette, sauf qu'un pasteur du nom de István Magyari a voulu dénoncer à la cour de Vienne les rumeurs qui couraient au sujet de la comtesse Báthory, entre 1602 et 1604. Ce n'est qu'en 1610 que l'empereur Matthias 1er du Saint-Empire accepta de se pencher sur ces histoires, et qu'il chargea le palatin de Hongrie György Thurzó de l'enquête. Entre 1610 et 1611, ce ne furent pas moins de 300 témoignages qui furent recueillis, et la comtesse se retrouva ainsi assignée à résidence.

Les premières victimes recensées d'Erzsébet Báthory étaient de jeunes paysannes de la région qui avaient été attirées par les offres de travail grassement payées pour devenir servantes au château de Čachtice. Par la suite, les victimes auraient été des filles de la petite noblesse que leurs parents envoyaient à ce château afin d'apprendre l'étiquette. Parmi les descriptions recensées, on déplore des passages à tabac qui auraient souvent entraîné la mort, des brûlures et autres mutilations, des morsures et même de la dénutrition. La comtesse n'aurait par ailleurs même pas commis ses méfaits uniquement au château de Csejte, elle aurait également sévi dans ses autres propriétés. Au final, on dénombra une centaine de victimes entre 1585 et 1610. Un carnet rédigé par la comtesse elle-même fut mentionné lors de son procès par un témoin, évoquant un total de 650 victimes recensées, mais personne ne vit jamais ce carnet.

L'ennui avec ces faits, c'est qu'ils ont été consignés sous la menace, voire sous la torture. Cela les rend ainsi difficilement crédibles, et c'est donc avec des pincettes qu'il faut les considérer. Au point qu'en 1984, un historien hongrois répondant au nom de László Nagy a avancé une théorie selon laquelle Erzsébet Báthory aurait finalement juste été la victime d'une machination et que rien de toute la légende l'entourant ne serait vrai. Bien que remise en cause peu après, en 1997, un dictionnaire encyclopédique d'histoire a mentionné que cette théorie est possible, précisant que la comtesse aurait voulu apporter son aide à son cousin Gabriel Báthory, alors prince de Transylvanie, contre les Habsbourg, et que des membres de sa famille auraient donc voulu l'empêcher de les trahir.

Ainsi, le 29 septembre 1610, Erzsébet Báthory fut arrêtée avec quatre de ses serviteurs. L'histoire raconte que ce jour-là, on aurait retrouvé plusieurs femmes enfermées chez la comtesse ainsi qu'un corps décédé et une mourante. Le procès eut lieu le 7 janvier 1611, procès durant lequel les quatre serviteurs furent reconnus coupables et exécutés. La comtesse, quant à elle, ne fut jamais poursuivie au tribunal, mais elle fut tout de même assignée à résidence jusqu'à sa mort, le 21 août 1614.

Valentine Penrose, auteur de "La Comtesse sanglante"
Valentine Penrose, auteur de "La Comtesse sanglante"

A la lecture de cet article, vous vous demandez très certainement, au vu des éléments qu'il contient, comment se fait-il qu'Erzsébet Báthory soit surnommée "la comtesse sanglante", et pourquoi on raconte qu'elle prenait des bains de sang, du sang de jeunes vierges qu'elle sélectionnait, dans le but de préserver sa jeunesse pour l'éternité. Car, effectivement, rien dans son histoire que vous venez de lire n'évoque cela. Eh bien, il s'avère qu'une grande partie de ce que l'on raconte sur la comtesse ne vient finalement que de l'esprit d'une romancière issue du mouvement surréaliste. Cette femme, du nom de Valentine Penrose, a sorti un livre en 1962, titré "La Comtesse sanglante". Tout ce qui a trait à la légende d'Erzsébet Báthory liée au sang ne vient que de cette œuvre en réalité. Il n'y a aucune preuve de la véracité de ces dires, et il faut donc les considérer comme un simple récit fictif.

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